Fonction totient de Jordan

En théorie des nombres, la k-ième fonction totient de Jordan Jk — nommée d'après le mathématicien Camille Jordan — est la fonction arithmétique qui à tout entier n > 0 associe le nombre de k-uplets d'entiers compris entre 1 et n qui, joints à n, forment un (k + 1)-uplet de nombres premiers entre eux. C'est une généralisation de la fonction φ d'Euler, qui est J1.

Calcul

La fonction Jk est multiplicative et vaut

J k ( n ) = n k p | n ( 1 1 p k ) , {\displaystyle J_{k}(n)=n^{k}\prod _{p|n}\left(1-{\frac {1}{p^{k}}}\right),}

où le produit est indexé par tous les diviseurs premiers p de n.

On peut définir plus généralement Jk pour tout réel k non nul et même pour « presque » tout complexe k, par la même formule[1].

Propriétés

La formule

d | n J k ( d ) = n k {\displaystyle \sum _{d|n}J_{k}(d)=n^{k}}

se réécrit[2] en termes de la convolution de Dirichlet, de la fonction constante 1(n) = 1 et de la fonction puissance Idk(n) = nk

J k 1 = I d k {\displaystyle J_{k}*{\mathbf {1} }={\rm {Id}}_{k}}

ou encore, par inversion de Möbius

J k = μ I d k {\displaystyle J_{k}=\mu *{\rm {Id}}_{k}}

ce qui justifie le qualificatif de « totient » pour Jk.

Une fonction est dite totient si elle est, pour la convolution de Dirichlet, le produit d'une fonction complètement multiplicative et de l'inverse d'une fonction complètement multiplicative[3] — or Idk et l'inverse 1 de μ sont complètement multiplicatives.

Cela permet par ailleurs d'étendre la définition de Jk à tout nombre complexe k : par exemple J0 = δ1[réf. souhaitée].

Fonction totient et séries de Dirichlet

Comme la série de Dirichlet génératrice de la fonction de Möbius μ est 1/ζ(s) et celle de Idk est ζ(s – k), on en déduit celle de Jk :

n 1 J k ( n ) n s = ζ ( s k ) ζ ( s ) . {\displaystyle \sum _{n\geq 1}{\frac {J_{k}(n)}{n^{s}}}={\frac {\zeta (s-k)}{\zeta (s)}}.}

Un ordre moyen de Jk(n) est n k ζ ( k + 1 ) . {\displaystyle {\frac {n^{k}}{\zeta (k+1)}}.}

La fonction psi de Dedekind (en) est

ψ ( n ) = n p | n ( 1 + 1 p ) = J 2 ( n ) J 1 ( n ) . {\displaystyle \psi (n)=n\prod _{p|n}\left(1+{\frac {1}{p}}\right)={\frac {J_{2}(n)}{J_{1}(n)}}.}

Ses généralisations, les fonctions multiplicatives Jk/J1 et J2k/Jk, sont encore à valeurs dans ℕ* car elles coïncident, sur les puissances de nombres premiers, avec des produits de polynômes cyclotomiques.

Formule de Gegenbauer[4] :

δ n δ s J r ( δ ) J s ( n δ ) = J r + s ( n ) . {\displaystyle \sum _{\delta \mid n}\delta ^{s}J_{r}(\delta )J_{s}\left({\frac {n}{\delta }}\right)=J_{r+s}(n).}

Ordres de groupes de matrices

L'ordre du groupe linéaire GL(m, ℤ/nℤ) est[5]

| G L ( m , Z / n Z ) | = n m ( m 1 ) 2 k = 1 m J k ( n ) . {\displaystyle |{\rm {GL}}(m,\mathbb {Z} /n\mathbb {Z} )|=n^{\frac {m(m-1)}{2}}\prod _{k=1}^{m}J_{k}(n).}

Celui du groupe spécial linéaire SL(m, ℤ/nℤ) est

| S L ( m , Z / n Z ) | = n m ( m 1 ) 2 k = 2 m J k ( n ) . {\displaystyle |{\rm {SL}}(m,\mathbb {Z} /n\mathbb {Z} )|=n^{\frac {m(m-1)}{2}}\prod _{k=2}^{m}J_{k}(n).}

Celui du groupe symplectique Sp(2m, ℤ/nℤ) est

| S p ( 2 m , Z / n Z ) | = n m 2 k = 1 m J 2 k ( n ) . {\displaystyle |{\rm {Sp}}(2m,\mathbb {Z} /n\mathbb {Z} )|=n^{m^{2}}\prod _{k=1}^{m}J_{2k}(n).}

Les deux premières formules ont été découvertes par Jordan.

Exemples

L'OEIS donne des listes explicites pour J2 (OEIS A007434), J3 (OEIS A059376), J4 (OEIS A059377), J5 (OEIS A059378) et J6 à J10 (OEIS A069091 à OEIS A069095).

Des quotients par J1 sont J2/J1 (OEIS A001615), J3/J1 (OEIS A160889), J4/J1 (OEIS A160891), J5/J1 (OEIS A160893), J6/J1 (OEIS A160895), J7/J1 (OEIS A160897), J8/J1 (OEIS A160908), J9/J1 (OEIS A160953), J10/J1 (OEIS A160957) et J11/J1 (OEIS A160960).

Des exemples de quotients J2k/Jk sont J4/J2 (OEIS A065958), J6/J3 (OEIS A065959) et J8/J4 (OEIS A065960).

Notes et références

  1. Voir Somme de Ramanujan, § φ(n) (sous réserve que k ne soit ni nul, ni de la forme i2πm/logp pour un entier non nul m et un nombre premier p, qui sont alors uniques).
  2. (en) Jozsef Sándor et Borislav Crstici, Handbook of number theory II, Kluwer Academic, , 637 p. (ISBN 978-1-4020-2546-4, lire en ligne), p. 106.
  3. (en) Anthony A. Gioia, The Theory of Numbers : An Introduction, Dover, , 207 p. (ISBN 978-0-486-41449-2, lire en ligne), p. 29
  4. (en) Matthew Holden, Michael Orrison et Michael Varble, « Yet another Generalization of Euler's Totient Function ».
  5. Toutes ces formules sont extraites de (en) Dorin Andrica et Mihai Piticari, « On some Extensions of Jordan's arithmetical Functions », Acta Universitatis Apulensis, vol. 7,‎ (lire en ligne).
  • (en) Leonard Eugene Dickson, History of the Theory of Numbers (en) [détail des éditions], vol. I, 1971, Chelsea Publishing (ISBN 978-0-8284-0086-2), p. 147
  • (en) M. Ram Murty, Problems in Analytic Number Theory, Springer, coll. « GTM » (no 206), , 452 p. (ISBN 978-0-387-95143-0, lire en ligne), p. 11
  • (en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Jordan's totient function » (voir la liste des auteurs).
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